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    Mme Anne-Marie BerthonneauM. Pierre Cadiot

    PrésentationIn: Langue française. N°91, 1991. pp. 3-6.

    Citer ce document / Cite this document :

    Berthonneau Anne-Marie, Cadiot Pierre. Présentation. In: Langue française. N°91, 1991. pp. 3-6.

    doi : 10.3406/lfr.1991.6201

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1991_num_91_1_6201

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_lfr_582http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_lfr_37http://dx.doi.org/10.3406/lfr.1991.6201http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1991_num_91_1_6201http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1991_num_91_1_6201http://dx.doi.org/10.3406/lfr.1991.6201http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_lfr_37http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_lfr_582

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    PRÉSENTATION

    On

    trouvera

    dans ce volume des études centrées

    sur

    les prépositions à, après,

    avant,

    avec,

    de, en,

    par, pendant, pour, sous, sur,

    en

    position

    post-nominale

    ou

    postverbale. Il s agit

    tantôt

    d une tentative de caractérisation d une préposition au

    travers d un ensemble d emplois (J.-J.

    Franckel et

    D. Lebaud) ou dans un type

    d emploi (B.

    Bosredon et

    I. Tamba, D. Leeman), tantôt d études

    contrastives

    (J.-C.

    Anscombre, A.-M. Berthonneau, P. Cadiot).

    La

    difficulté essentielle de

    l étude

    des prépositions est qu elles

    ne

    se

    laissent

    appréhender

    qu au

    travers

    de

    leurs contextes

    d emploi, qui démultiplient les inter

    prétations.

    Des analyses désormais classiques ont postulé des

    systèmes

    sémiotiques

    généraux, mettant

    en

    œuvre

    des

    valeurs abstraites

    sous-jacentes

    aux

    prépositions

    (par

    exemple

    G. Guillaume 1919, V. Brondal 1950, B.

    Pottier

    1962). Mais l opérativité

    de

    ces

    descriptions est difficilement

    contrôlable

    au plan des sens en

    emploi.

    A l inverse,

    la riche

    étude

    de

    Spang-Hanssen

    (1963) faisait une large part à ce niveau,

    mais

    pour

    déduire souvent une

    équivalence sémantique entre deux

    prépositions

    commutables

    dans un contexte, sans demander

    à ce

    dernier tous les indices distributionnels qui

    auraient

    donné

    accès

    à

    leur différence (cf.

    aussi

    Jaeggi 1956).

    Plus

    récemment,

    les

    prépositions ont

    connu

    un regain d intérêt avec l approche cognitiviste (Lakoff

    1987,

    Langacker 1987, etc.). Ce n est sans doute pas un hasard si les emplois spatiaux ont

    été privilégiés. Ils se prêtent au mieux

    à

    illustrer le

    rôle

    des propriétés des objets

    du

    monde et des stratégies perceptives. Mais la pertinence des considérations cognitives

    et

    pragmatiques

    doit

    être

    tempérée

    par

    le

    fait

    que la

    langue

    est

    d abord

    un système

    de

    représentation

    autonome. Ainsi,

    l hypothèse

    de

    Vandeloise

    (1986),

    selon

    laquelle la

    structuration des relations spatiales dans la

    langue,

    au

    moins

    dans

    une transparence

    étymologique initiale, procéderait

    directement

    de la perception, ne renvoie-t-elle pas

    largement

    les principes

    d analyse

    des

    prépositions

    à l extralinguistique ? *

    Ces

    repères

    bibliographiques très

    partiels

    n ont

    d autre

    fonction que

    nommer

    trois pôles pertinents pour

    l étude

    des prépositions, l invariance postulée du

    marqueur, l interprétation du syntagme, l interface de l énoncé avec l extralinguisti-

    que.

    Une telle

    présentation

    discrétise bien sûr, par

    commodité, des niveaux qu on

    peut vouloir appréhender dans un continuum.

    Brondal V. (1950), Théorie des

    prépositions : introduction à une

    sémantique rationnelle,

    Copenhague, Munksgaard.

    Jaeggi

    (1956), Le

    rôle

    de la préposition et de

    la

    locution prépositive dans les rapports abstraits

    en

    français

    moderne, France, Berne.

    Guillaume С (1919) rééd. 1975,

    Le problème de

    l article et

    sa

    solution dans la langue française,

    Paris,

    Nizet

    Québec, Presses de

    l Université

    Laval.

    Lakoff G.

    (1987), Women, Fire and

    Dangerous Things. What

    Categories

    Reveals

    about the Mind,

    Chicago, London, The University of Chicago Press.

    Langacker R. W. (1987),

    Foundations of

    Cognitive Grammar, vol.1. Theoritical Prerequisites,

    Stanford

    University

    Press.

    Pottier B. (1962), Systématique des éléments de relation, Paris,

    Klincksieck.

    Spang-Hanssen E. (1963), Les

    prépositions

    incolores du français moderne, Copenhague, G.E.C.

    GAD.

    Vandeloise C. (1986), L espace en français,

    Paris,

    Le Seuil.

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    1)

    Des

    approches

    classiques, on

    peut

    retenir

    le

    souci

    d abstraire, par réduction

    à

    partir des différents emplois, une représentation du « sens » des prépositions,

    c est-à-dire des opérations

    abstraites qui

    régleront leur mise en emploi. Nous faisons

    donc

    nôtre

    l hypothèse

    que derrière la diversité

    de ses

    emplois, chaque préposition

    a

    un noyau

    fixe de

    sens,

    appréhendable

    en

    termes abstraits de

    valeur,

    de procédures

    ou

    d instructions

    Cependant, la trace de cette

    invariance

    ne peut

    être

    repérée que dans le

    foisonnement

    des

    effets

    de

    sens. Cela

    implique

    de

    désintriquer,

    à

    partir

    de familles

    d énoncés, les

    variables

    en interaction

    dans

    la production de

    ces

    effets,

    de distinguer

    le stable

    du

    contingent.

    Pour

    remonter de

    l observable à l invariant, il faut prendre

    un

    appui

    contrôlé

    sur les

    indices que livrent les co-variations

    du

    sens

    et

    des configura

    tions ne

    mise

    en contraste systématique de prépositions

    apparaît

    par ailleurs

    comme

    une sorte

    d heuristique permettant de dépasser

    les

    constats approximatifs

    d identité qui généralisent hâtivement

    à partir

    d observations locales.

    2)

    L instruction donnée

    par l invariant se traduit, au

    niveau du

    sens en emploi,

    par des types de

    conditionnements

    du réfèrent, qui préformatent les

    possibilités

    de

    parler

    du monde. C est ce

    que nous

    avons voulu cerner

    par la notion

    de

    «

    représen

    tation,

    qui

    revêt deux aspects.

    Ce

    qu on

    appelle

    ordinairement

    «

    cause

    »,

    « instrumental »,

    « durée

    »,

    etc.

    relève

    de ce lieu intermédiaire

    où viennent s intriquer

    les propriétés des

    prépositions,

    du

    lexique et des déterminants, sans exclure une

    mobilisation

    plus large du contexte

    d apparition :

    réseau

    des relations actantielles induites

    par

    un verbe, un adjectif ou un

    nom, thématisation, propriétés aspectuelles, etc. On peut toutefois traduire de

    diverses

    manières

    ces

    notions expérientielles

    en

    termes

    plus

    abstraits,

    en

    leur accolant

    des propriétés

    spécifiques,

    en

    repérant

    des sous-ensembles

    différenciées

    d une cons

    truct ion

    apparemment

    identique,

    en

    les

    ramenant

    à

    des modulations locales

    d un

    invariant,

    etc.

    Déterminants

    et prépositions entretiennent des liens

    complexes.

    Divers cas de

    figure

    sont représentés

    par

    les

    prépositions

    ou

    emplois

    étudiés

    ici.

    L absence

    de

    déterminant ou

    une

    détermination limitée

    à

    l article

    défini, avec à,

    après, avant,

    de, en,

    par,

    sous,

    sur

    permettent

    de construire des dénominations

    ou

    d élaborer des repré

    sentat ions

    plus ou

    moins

    extensives, calibrées,

    épurées,

    centrées, métaphorisées

    du

    réfèrent.

    Pendant

    et

    pour

    utilisent chacun

    à

    leur manière des clivages entre

    types

    de

    détermination

    pour

    construire des interprétations différenciées. Passer de

    à à

    avec

    dans deux emplois apparentés rejoue aussi les

    déterminants

    disponibles.

    Ces deux aspects

    ne

    sont pas entièrement disjoints, puisque la façon

    dont

    le SN

    prépositionnel donne le

    réfèrent

    contribue

    à

    instaurer les effets de sens dénommés en

    termes expérientiels.

    3)

    La

    mise en œuvre

    d un

    type de

    représentation conditionne

    la donation de la

    référence

    de

    l énoncé

    :

    effets

    de déréférenciation,

    de

    généricité,

    de typicité,

    sélection

    parmi

    les

    interprétations potentielles des déterminants

    et

    des procès.

    Les

    prépositions

    contribuent ainsi

    à filtrer les relations qu un énoncé

    peut établir avec des situations

    extralinguistiques.

    Mais

    les

    propriétés

    pragmatiques

    participent aussi

    à cet ajust

    ement référentiel.

    On peut invoquer diverses formes d habitualité

    (sous-jacentes à

    la

    constitution

    de types,

    intervenant dans la répartition

    des

    marqueurs

    de

    durée),

    des

    stéréotypies qui légitiment

    l association

    privilégiée d un verbe et d un complément,

    l aptitude différente des notions

    à

    donner

    lieu à une valeur centrée,

    etc.

    Les auteurs

    n ont

    pas pondéré ces trois pôles de la même manière, puisque nous

    avons fait le choix de la diversité des modes d approche.

    Contrastant à et

    avec dans de nombreux contextes, P. Cadiot propose une

    hypothèse

    très

    générale.

    A

    la

    façon

    de l anaphore associative,

    l occurrence

    de

    à

    s explique

    par

    un

    mécanisme

    de traitement analytique de la représentation

    mentale

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    associée

    au

    prédicat-tête (ou, dans le cas des noms composés, au

    N1).

    Aucune source

    d information autre

    n est

    sollicitée.

    L inverse

    exactement est vrai de la préposition

    avec,

    qui

    s interprète

    comme la

    trace

    d une procédure synthétique. Ce

    principe

    d explication, dont

    on peut au passage noter qu elle

    s inscrit dans

    le programme d une

    linguistique « cognitive » entièrement procédurale qui éviterait de

    confondre le

    sens

    avec le réfèrent, se monnaye par

    l ensemble

    des effets distributionnele

    et

    interprétatifs

    que l auteur détaille, mais aussi

    par

    des traitements modulables de ces sources

    référentielles.

    Traitant

    des combinaisons

    préposition-article

    zéro

    (du type

    sous anesthésie), J.-C.

    Anscombre étudie les propriétés syntaxiques de ces constructions, leurs

    restrictions

    et

    contraintes

    distributionnelles, et propose une métalangue sémantique

    qui

    rejoint

    celle

    d autres auteurs

    (propriétés

    essentielles vs accidentelles,

    homogénéité,

    continu). Il

    insiste notamment,

    dans

    le prolongement

    de ses travaux antérieurs,

    sur

    les propriétés

    aspectuelles des

    noms

    (stativité,

    résultativité, cyclicité).

    Partant

    d une

    opposition de

    principe

    entre nom

    composé et

    syntagme nominal

    qui

    se

    noue essentiellement

    autour des

    catégories

    du genre et du

    nombre, B.

    Bosredon

    et

    I.

    Tamba

    insistent

    sur les

    deux paradigmes qui se

    dégagent pour

    la préposition à.

    A

    l inverse

    du

    SN,

    les

    propriétés

    de

    N2

    lui

    sont,

    dans

    le

    cadre

    du

    nom

    composé

    N.C.,

    attribuées « en dehors de toute application à des referents

    situationnels

    ».

    es auteurs

    montrent que le rapport

    de sous-classification est au N.C. ce

    que

    le

    rapport

    de

    prédication

    et

    au S.N.

    et

    opposent deux

    types

    de

    motivations

    internes

    :

    à

    proche de

    pour

    et

    à

    proche de avec.

    J.-J. Franckel et D. Lebaud recourent

    à

    une

    hypothèse

    unitaire sur en,

    préposition et

    préfixe, pour analyser un panel d emplois

    aussi

    variés

    que

    enrouler du

    papier, du papier

    en rouleau. Il est en ville. Il est

    en

    beauté,

    un manteau

    en

    laine, en

    homme, en 1981, en ces années terribles,

    etc.,

    et le

    gérondif.

    Le

    paradoxe à

    résoudre est

    que si le nom qui suit en, presque

    toujours

    non déterminé,

    ne

    permet pas de distinguer

    des

    occurrences,

    le réfèrent est pourtant saisi de façon contingente, circonstancielle :

    II

    trouve

    son

    ancrage

    référentiel

    dans

    la

    construction d une

    occurrence

    complexe

    avec

    un

    second

    terme.

    Les

    différents emplois de en

    analysés sont ramenés à

    des types qui

    ne se confondent pas avec un étiquetage expérientiel mais reflètent des manifestations

    différentes de cette

    contingence

    (actualisation, fusion, fonction, intégration, etc.).

    Etudiant les

    constructions

    de type

    hurler

    de rage, D. Leeman montre

    en

    quoi

    consiste le

    calcul d ajustement des propriétés du

    prédicat

    verbal et du

    nom-régime.

    Elle met ainsi en évidence

    l existence

    de trois phases, donc

    d un

    continuum du

    concret

    vers

    l abstrait,

    qui est aussi un continuum interprétatif entre un sens référentiel

    plein

    (Luc klaxonne d impatience) et

    un sens subduit, voire

    entièrement métaphorique (Luc

    brûle d impatience), où le

    verbe

    n a plus

    qu un sens

    intensif. Cette étude,

    qui met en

    jeu

    de

    nombreux

    tests

    syntaxiques,

    peut

    se

    prolonger en une

    sorte

    de

    grammaire

    (dont

    la préposition

    de

    serait le

    pivot)

    de

    l expression

    des affects (sensations, sentiments).

    A.-M.

    Berthonneau analyse des

    versions

    concurrentes de

    la notion

    de durée

    et

    délimite un sous-groupe de compléments qu on

    peut dire

    duratifs, sur la

    base

    de

    propriétés partagées. Elle contraste ensuite

    les

    représentations différenciées de la

    durée construites par pendant

    et

    pour, en

    formulant une

    description sémantique pour

    chaque

    complément, qui

    a à

    charge de rendre compte de

    deux types

    de

    faits

    : la

    configuration du SN

    duratif, la donation

    de

    la

    référence

    par

    l énoncé.

    Pendant oppose

    la durée et

    une autre

    interprétation temporelle par des contrastes

    clairs

    de

    détermi

    nants,

    our est

    plus atypique. S ils se

    paraphrasent

    parfois, ces compléments ont

    une

    incidence différente

    sur les

    déterminants de

    l énoncé et les

    procès. Cette

    hypothèse

    sur

    le

    rôle structurant

    du

    sens

    n exclut

    cependant pas

    la

    prise en

    compte

    de

    propriétés

    pragmatiques.

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    Une

    part des problèmes abordés dans ces diverses contributions pourrait se

    reformuler ainsi : quelles procédures sont en

    jeu

    dans l interaction entre prépositions

    et détermination

    ? Les

    faits

    de

    déréférenciation

    et de « généricité » observés à propos

    de

    à,

    en, de ont-ils leur

    source

    dans

    la

    préposition ou dans

    le

    déterminant

    qui

    lui

    est

    étroitement

    associé

    ?

    La

    sélection

    des

    déterminants n est-elle

    qu un

    effet

    des contrain

    t s

    lus générales

    sur

    la construction de la référence ? Comment

    une

    préposition

    met-elle des contraintes locales

    sur

    les

    déterminants

    au

    service

    de la construction d un

    type

    de

    représentation

    ?

    Est-ce

    que

    l ensemble

    des

    propriétés

    ne

    se

    déduit

    pas d un

    certain

    nombre de principes simples : continu vs discontinu,

    programme

    de sens,

    représentations synthétique

    vs

    analytique des connaissances.

    A.-M. Berthonneau et P. Cadiot.